Le stiffness : ce terme ne vous est peut-être pas familier, et pourtant…
Stiffness signifie raideur. La raideur est garante d’une bonne transmission de la force développée par le muscle à travers le tendon. Ce dernier doit être capable d’emmagasiner et restituer de l’énergie. Un tendon trop lâche, trop souple est un tendon qui absorbe de la contrainte sans la restituer.
Le stiffness est le garant d’une bonne capacité à restituer l’énergie en nous propulsant après réaction du sol. Il peut être comparé à un effet rebond ou ressort ! Un ressort trop lâche va s’étirer, sans permettre de mobiliser ce à quoi il est rattaché alors qu’un ressort ou un tendeur dur et raide va permettre de transmettre la force !
Comment travailler le stiffness?
Le rebond nécessite :
– un pied fort et réactif
– Un tendon raide
– Un muscle fort, endurant et réactif
“Nos contemporains ne sont pas assez forts”. C’est ainsi que nous avions commencé le post sur le renforcement musculaire ! Celui-ci pourrait largement être complété ainsi : “Les pieds de nos contemporains ne sont pas assez forts !”
La cause ? Moins d’activité, des chaussures de plus en plus sophistiquées et PROTECTRICES. Cela est aussi lié à nos sentiers autoroutiers : marcher sur du carrelage, du bitume lisse, des trottoirs urbains plats et réguliers n’a rien à voir pour le pied avec les sollicitations des terrains techniques.
Le pied fort se travaille notamment en marchant pieds nus ou en chaussures minimalistes, en évitant de trop protéger son pied et en l’exposant PROGRESSIVEMENT et GRADUELLEMENT à ces sollicitations. Gainer son pied, c’est possible ! Des exercices de gainage et de renforcement des muscles intrinsèques du pied sont possibles !
Le travail de cadence favorise un appui sur l’avant pied qui permet d’augmenter les contraintes sur le complexe cheville-pied et donc de le rendre plus fort. Là encore, on ne le répètera jamais assez, SOYEZ PROGRESSIF et à l’écoute de vos sensations.
La cadence, ce n’est pas la vitesse, on peut courir à une cadence très élevée à 0 km/h (sur place). Courir sur place à 190 pas par minutes, c’est faire 95 sauts sur chaque pied en une minute, là ou vous en auriez fait 80 à 160 pas par minutes. Cela est très intéressant pour votre pied mais là aussi, il convient de le doser pour exposer votre pied PROGRESSIVEMENT.
“Trop protéger, c’est affaiblir, Exposer graduellement, c’est renforcer” (B. Dubois), Exposer trop rapidement, c’est léser.
Un tendon raide se travaille :
- par les exercices de force, (isométrique, concentrique, excentrique, pliométrique). La charge appliquée sur le tendon est plus génératrice d’adaptations que le type de contraction utilisé.
- La pliométrie. Ce n’est pas un type de contraction à proprement parler mais l’alternance de contractions excentriques et concentriques avec une notion de vitesse dans l’enchaînement des deux. C’est le travail le plus fonctionnel et le plus révélateur de ce que l’on attend de nos tendons, notamment au niveau du quadrant inférieur pour la locomotion. La course à pied est par définition une activité pliométrique. Cependant, certains types de courses et d’exercices permettent de mieux l’optimiser :
- La course en côte avec appui sur l’avant du pied.
- les gammes athlétiques qui vont nécessiter une bonne coordination inter (agonistes-antagonistes) et intramusculaire.
Les gammes : Les gammes athlétiques sont au traileurs ce que les arpèges sont aux musiciens, ce sont les bases !
Le travail de gammes permet d’améliorer la posture, la dynamique de course, la force du pied, la coordination et la raideur.
Les gammes de bases sont les montées de genoux, les talons fesses, le griffé et les foulées bondissantes. Chacunes d’elles peuvent être faites en continu ou avec des temps de pauses réguliers (tous les 3 balancements de bras par exemple) pour travailler posture, équilibre et coordination.
A l’école de trail, nous aimons intégrer gammes et course ou gamme et travail technique en montée et descente afin d’appliquer directement de manière fonctionnelle ce que l’on recherche par ces exercices spécifiques. Tout comme le renforcement musculaire, combiner course et gammes ou course et renforcement musculaire est la meilleure façon d’obtenir une bonne assimilation de ces bénéfices et améliorer l’efficience du geste.
L’intégration et la progression de mise en place de ces sollicitations suit également une logique de la planification et de cycle de travail Ecole de Trail.
Pourquoi augmenter cette raideur?
Comme vu précédemment, améliorer la raideur permet d’améliorer la transmission de la force par le tendon. Nous pourrions alors nous demander pourquoi la nature nous a-t-elle fait des tendons en partie déformables et non pas 100% rigides.
La rigidité ne permet pas l’emmagasinement-restitution d’énergie, “l’arbre casse, alors que le roseau plie mais ne rompt pas”. C’est pour cela que nos tendons contiennent beaucoup de fibres de collagènes (dures) mais également des fibres élastiques afin d’avoir cette ADAPTABILITÉ. Sans élasticité, pas d’effet ressort (emmagasinement-restitution d’énergie). L’élasticité est d’avantager permise grâce aux muscles et aux enveloppes qui l’entourent (aponévroses) que grâce au tendon.
Améliorer la raideur permet d’avoir un maximum de transmission de force tout en conservant cette capacité de rebond et de restitution passive (énergie élastique).
Un arc tendu envoie la flèche bien plus loin qu’une corde trop élastique.
En bénéficiant de cette énergie passive, on améliore l’économie de course car cette énergie passive, par définition, ne nous coûte rien. Ainsi, le geste est plus efficient et économe.
Cela permet également de prévenir les blessures car un tendon et un complexe musculo-tendineux forts permettent d’augmenter la capacité du corps à accepter la contrainte mécanique or, nous savons que la blessure apparaît lorsque la contrainte dépasse les capacités maximales d’adaptation de l’organisme.
Mobilité, raideur ? Tout et son contraire ?
Et non ! Ces deux caractéristiques sont nécessaires et utiles au coureur (et pas que d’ailleurs). Comme nous l’avons vu dans notre post Mobilité, celle-ci correspond à votre capacité à explorer des amplitudes articulaires les plus physiologiques possibles. Elle consiste aussi à entraîner sa musculature à explorer ces amplitudes et à maintenir ces postures.
La raideur n’est pas l’opposé de la mobilité puisqu’elle concerne le complexe musculo-tendineux. Ainsi, on peut avoir un pied et une cheville mobile et souple sur le plan articulaire mais avec une capacité à se raidir et se rigidifier de façon active et contractile lorsque l’activité le nécessite. C’est la combinaison du stiffness et de la mobilité qui garantit le mieux un système musculo-squelettique performant et adapté à la contrainte mécanique !
Le pied montagnard ! On entend souvent parler du pied montagnard qu’envient tant de coureurs de plaine. Celui-ci est en partie lié à cette raideur mais pas seulement. La raideur et le gainage du pied peuvent compenser le manque de rigidité et de dureté du sol. Ainsi une personne habituée à marcher “hors sentiers” dans l’herbe dans des “champs de patates” comme on aime le dire développe un pied plus fort. Outre cela, le montagnard développe également un système de stabilisation et un sens proprioceptif accru. Pour autant il est nécessaire de travailler ce rebond propre à la course à pied et au trail running. Donc marcher en montagne ne suffit pas.
Alors mettez du rebond dans vos séances, mettez de la raideur et du rebond dans vos gammes et prenez soin de vos pieds, car ce sont finalement eux les premiers et espérons-le le seul élément de votre corps qui toucheront le sol !
Enfin et surtout, soyez progressif et graduel et rappelez-vous que 80% des blessures du coureurs sont liées à des erreurs d’entraînement et au manque de progressivité.